Alternance
7 février 2025

Après quatre années de forte croissance de l’apprentissage dans les 13 branches professionnelles couvertes par Atlas (+137 %), l’année 2025 devrait correspondre à une phase de consolidation, dans un contexte de ralentissement de l’économie, analyse Nicolas Rivier, directeur du développement chez Atlas. 

Cette période doit être l’occasion de renforcer la qualité de l’alternance en travaillant notamment sur la prévention et l’accompagnement des ruptures de contrat. 

L’enjeu pour les CFA est également de contribuer à renforcer l’attractivité de l’alternance pour des 13 branches d’Atlas tout en adaptant les contenus pédagogiques aux nouveaux enjeux, en particulier la transition écologique.

Nicolas Rivier, directeur du développement chez Atlas, répond à nos questions

Quel bilan tirez-vous de l’alternance en ce début d’année 2025 dans les branches couvertes par l’OPCO Atlas ?

L’alternance dans les branches d’Atlas a connu une dynamique exceptionnelle ces dernières années, avec une forte croissance des entrées en apprentissage qui a contribué à changer l’image et le vécu de l’alternance pour de nombreux jeunes et leurs familles. Nous pouvons tous nous en féliciter, à la fois pour nos jeunes, pour les entreprises de nos branches et pour l’économie de notre pays. Mais aujourd’hui, nous atteignons un palier. 

Deux éléments entrent en jeu : d’une part, nous avons atteint un niveau structurel élevé, ce qui fait que la croissance va mécaniquement ralentir. D’autre part, la conjoncture économique devient plus difficile et cette situation risque d’avoir un impact sur le marché de l’emploi, notamment dans certains secteurs clés couverts par Atlas, comme le numérique, l’ingénierie ou le conseil.

Pour les CFA qui forment aux métiers de ces branches, cela signifie qu’ils doivent adapter leur modèle. Ils ne peuvent plus uniquement projeter une augmentation du nombre de contrats : une autre priorité doit être de consolider et d’améliorer la qualité des parcours. Cette période de consolidation est un moment clé pour l’apprentissage et pour son image sur le long terme, tant auprès des jeunes et de leurs familles que des entreprises et des pouvoirs publics.

Justement, quels sont les principaux défis à relever pour les CFA qui forment aux métiers des branches couvertes par Atlas ?

Le premier défi, c’est la gestion des ruptures. Un CFA qui enregistre un taux de rupture supérieur à 15-20 % doit s’interroger. Chaque rupture représente une perte de revenus pour le CFA, un échec pour l’apprenti et un échec pour l’entreprise. Certains CFA ont réussi à diviser leur taux de rupture par deux en mettant en place un meilleur accompagnement des jeunes et des entreprises. C’est un levier d’amélioration immédiat. 

Les ruptures de contrats d’apprentissage peuvent toujours se produire, mais dans cette hypothèse le CFA va jouer un rôle clé pour analyser la situation et réorienter le jeune vers une autre opportunité. La rupture ne doit pas être gérée sous le seul prisme de la situation administrative et contractuelle.

Le deuxième défi, c’est l’évolution du modèle économique. Avec la baisse des NPEC, les CFA doivent apprendre à travailler différemment, en investissant davantage dans la pédagogie et la relation avec les entreprises. Ce n’est plus simplement une question de recrutement des apprentis, mais d’un véritable accompagnement pour garantir leur réussite.

Enfin, il y a l’enjeu de l’attractivité. Les branches couvertes par Atlas sont fortement impactées par la transformation numérique, les nouvelles attentes des entreprises en matière de compétences et les aspirations des jeunes générations.

Nous avons lancé cette année annoncesAtlas, un job board dédié aux secteurs des services financiers pour rapprocher l’offre et la demande sur le marché de l’emploi en alternance. Nous allons poursuivre dans cette démarche avec l’organisation d’événements régionaux dédiés à l’alternance pour aller à la rencontre directe des jeunes et des entreprises.

Et parallèlement nous poursuivons notre action de fonds sur l’orientation et la promotion des métiers, en démultipliant nos actions, notamment au sein des établissements scolaires grâce aux Journées de l’Orientation et de l’Alternance, afin de faire connaitre les métiers de nos branches et les modalités pour les rejoindre.

Face à ces défis, comment les CFA peuvent-ils adapter leur modèle économique ?

Il faut que les CFA abandonnent l’idée d’un renforcement global du niveau des NPEC dans le contexte budgétaire dans lequel évolue notre pays. L’apprentissage a bénéficié d’importants financements ces dernières années, mais le niveau de ces aides risque de continuer à refluer. Le défi est désormais de rechercher une meilleure maîtrise des coûts, une optimisation du remplissage des sessions tout en proposant une offre de qualité susceptible de justifier les éventuels restes à charge pour les entreprises. 

Concernant le financement de l’investissement des CFA, Atlas souhaite jouer pleinement son rôle d’appui, par l’intermédiaire des appels à projets, pour concrétiser les choix politiques de nos branches. Les CFA sont de plus en plus nombreux à proposer leurs projets. Nous avons expérimenté également plusieurs conventions de cofinancement avec des régions, comme en Centre Val de Loire.

Les réponses à vos questions

Les jeunes apprentis ont des attentes comparables à celles des autres salariés de leur génération. Ils s’inscrivent de plus en plus dans des stratégies de parcours et souhaitent valoriser leur apprentissage car ils estiment qu’il leur donne un avantage concurrentiel sur le marché du travail. 

Les jeunes ont des attentes fortes, notamment en termes de qualité de formation et d’engagement sur des sujets comme la transition écologique ou la place des nouvelles technologies dans leur métier. 

Les CFA doivent être capables de répondre à ces attentes.

La transition écologique transforme tous les métiers, y compris de l’assurance ou des services financiers. Certaines entreprises sont même des acteurs à part entière de la transition écologique. En ingénierie et en conseil, les compétences liées à la durabilité sont de plus en plus demandées. Les entreprises de ces secteurs sont en train d’intégrer de nouvelles pratiques, et les apprentis doivent être formés en conséquence.

Certains CFA l’ont bien compris et adaptent déjà leurs enseignements. Dans le domaine du numérique, la question du Green IT devient centrale et nécessite de nouvelles compétences. C’est pourquoi la branche des Bureaux d’études techniques, d’ingénieurs et des cabinets de conseil a créé avec l’appui d’Atlas un titre à finalité professionnelle (TFP) intitulé : « Responsable Green IT », en cours d’enregistrement par France Compétences.

Pour les CFA, c’est une opportunité à plusieurs niveaux.

D’une part, c’est un levier d’attractivité pour les jeunes, qui sont de plus en plus sensibles à ces questions. C’est même un facteur d’attractivité particulièrement fort pour féminiser certains métiers.

D’autre part, c’est un moyen de répondre aux attentes des entreprises et d’être en phase avec les évolutions du marché du travail.

Nous réfléchissons actuellement à des conventions avec des acteurs spécialisés dans ces domaines, dont l’Ademe pour accompagner cette transformation.

L’apprentissage fonctionne si l’écosystème est bien structuré. Une entreprise qui accueille un apprenti doit s’engager réellement dans sa formation. Or, aujourd’hui, on constate que certaines entreprises ont du mal à accompagner correctement leurs apprentis. C’est particulièrement vrai pour les TPE et PME, qui ont moins de ressources pour structurer un parcours d’intégration et réaliser un suivi continu.

Le rôle des CFA est aussi d’aider les entreprises à mieux recruter et à mieux intégrer les apprentis. Certains CFA qui prennent le temps d’évaluer précisément l’adéquation entre l’apprenti et l’entreprise enregistrent des taux de rupture beaucoup plus faibles. Ce travail de sélection et d’accompagnement est essentiel.

On observe également que les entreprises qui ont déjà une culture de la formation et de l’accompagnement ont de meilleurs résultats. Les structures qui font de l’apprentissage un levier stratégique, et pas seulement une réponse conjoncturelle, réussissent mieux à fidéliser leurs apprentis et à capitaliser sur leurs investissements.

Il faut que les CFA abandonnent l’idée d’un renforcement global du niveau des NPEC dans le contexte budgétaire dans lequel évolue notre pays. L’apprentissage a bénéficié d’importants financements ces dernières années, mais le niveau de ces aides risque de continuer à refluer. Le défi est désormais de rechercher une meilleure maîtrise des coûts, une optimisation du remplissage des sessions tout en proposant une offre de qualité susceptible de justifier les éventuels restes à charge pour les entreprises.

Concernant le financement de l’investissement des CFA, Atlas souhaite jouer pleinement son rôle d’appui, par l’intermédiaire des appels à projets, pour concrétiser les choix politiques de nos branches. Les CFA sont de plus en plus nombreux à proposer leurs projets. Nous avons expérimenté également plusieurs conventions de cofinancement avec des régions, comme en Centre Val de Loire.